mardi 30 avril 2013

Des miettes


Lucky Luke tire plus vite que son ombre. À l’instar du cowboy solitaire, la mienne tend à dégainer plus vite que moi.

Les changements de rythme, ça n’a jamais été mon fort. Un départ de course de vélo de montagne, ça va plutôt à l’encontre de ma nature ; passer en une fraction de seconde d’un état d’angoisse passive à une situation d’accélération sans condition, c’est me faire violence. Certes, j’ai un bon diesel, mais quand vient le temps de dégainer, bien souvent mon ombre me devance.

Or, je finis toujours par la rattraper, par l’avoir à l’usure.

Première course de vélo de montagne en fin de semaine dernière : C’est encore un peu ce qui s’est produit. Nous étions une cinquantaine alignés au départ, moi dans les derniers retranchements. Arrivé dans les derniers au box de départ, j’ai résisté à l’envie de lutter pour une position à l’avant du groupe. Ma faiblesse sur route de la semaine dernière (voir précédent article) m’ayant ôté toute confiance de la perspective d’un départ canon, j’ai préféré récolter les miettes. Bien des coureurs allaient tomber en cours de route, et j’allais les dépasser un à un comme une mouette ramasse une à une vos miettes de mc do.

Parlant de mc do, j’ai maladroitement fait violence à mon estomac trop peu de temps avant le départ.  Je lui ai confié le double mandat de digérer un plantureux bagel aux oignons et fromage et d’éviter de le vomir. Disons que j’étais en proie à quelques rots redondants.

Bien parti dans ma récolte d’erreurs de cadet, pourquoi ne pas modifier la position d’une de mes calles 30 minutes avant le départ, me dis-je. Résultat : mon pied est encore plus désaxé qu'avant. J’allais le constater peu de temps après le départ.

Je n’aime pas sortir une palette d’excuses, mais les astres ne s’étaient pas alignés en ma faveur.
Le départ est donné, nous nous élançons sur une belle ligne droite d’un kilomètre avant d’atteindre le premier single track. Une fois décollé, docilement, le peloton roule deux par deux, sans accident. Moi je débute ma récolte et dépasse quelques-uns partis un peu trop promptement.

Pour le reste de ce qui allait être une course de rattrapage, j’allais sans cesse surveiller mon pied mal enligné qui infligeait une inquiétante tension à mon genou, et lâcher quelques rots au passage.

Point positif : le parcours était fidèle à la réputation des tracés ontariens : toujours bien agréables à rouler, mais exigeants en compétition. Très roulants, sinueux, vallonneux et exempts de roches : ce sont de véritables montagnes russes où il rarement possible de relâcher les gaz.

Je conclus le tout au quatorzième rang, avec la même satisfaction que la mouette qui sait qu’elle n’a pas chipé tous vos sandwichs. J’aimerais bien dire que je serais allé plus vite sans mon genou mal enligné. Nous ne le saurons jamais.

La course s’est terminée en même temps que la digestion de mon bagel. Juste à temps pour avaler un lait au chocolat, gracieuseté de l’organisation.

Parlant de l’organisation : j’ai toujours eu un petit faible pour les épreuves en sol anglophone. L’aspect communautaire des événements sportifs est toujours bien plaisant : spectateurs toujours au rendez-vous et ambiance bien sociale. Remarquez, en plus des nombreux encouragements, de joviaux spectateurs s’étaient donné le mandat de pomper l’adrénaline. Ils avaient installé un système de son qui crachait son rythme juste avant la descente finale, digne d’une montagne russe.

C’est sans parler l’odeur de hot dogs et de toutes bonnes choses à saveur de viande grillée, redondante et s’amplifiant à chaque passage près de l’aire d’arrivée. La mouette en moi en bavait à chaque tour.

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