Je pédalais tout bonnement face au mur de mon sous-sol, pensant à ce merveilleux graphique en pleine production, quand soudain un malencontreux questionnement me traversa l’esprit : qu'est-ce que je fous là ?
C’est le genre de souci qui sème le doute lors d’un aride effort. Malgré toute la motivation qui excitait mon coup de pédale sur le trainer, je remarquai qu’il pleuvait autant dehors qu’en pleine saison sèche du Sahara. Il faisait beau et le mercure affichait un confortable -5 degrés. Moi, je m’astreignais à mes cruels intervalles. Six-fois-six-minutes-à-85%-et-t’es-déjà-à-bloc-dans-le-deuxième-lâche-pas-vieux-t’en-reste-juste-quatre. Pas de musique, un petit bruit de dérailleur à vous dérailler les nerfs et juste assez d’eau pour tenir.
Le ski de fond devait être super beau. Le ski alpin aussi d’ailleurs, du moins les remonte-pentes auraient manifesté plus de clémence à l’égard de mon postérieur.
Quatre minutes de récupération entre deux intervalles, c’est assez pour me ressaisir. Trêve de démotivation, je rassure ma pensée initiale : la saison approche à grande roue et son début ne fera pas dans la modestie. Faudra être affûté.
En effet, le calendrier 2012 est plutôt condensé. Toutes les compétitions importantes se dérouleront au début de la saison. En six semaines, du 19 mai au 30 juin, se succèderont trois coupes Canada, le championnat canadien et les deux coupes du monde nord-américaines. Cinq courses capitales, décisives pour le reste de l’été.
Décisives pour l’équipe du Québec, décisives pour l’équipe nationale, les championnats du monde et les jeux olympiques, et décisives pour mon égo.
Après ça, que reste-t-il ? Quelques coupes Québec et le championnat provincial. Bon, faudra s’y faire. Sinon, pour prolonger un peu la saison, subsistent les Jeux olympiques et les championnats mondiaux. Fantasque lubie ? Pour les Jeux, on oublie ça. Mais les championnats mondiaux, pourquoi pas ? Cette perspective me titille juste assez les mollets pour affronter avec hardiesse le troisième intervalle. Le quatrième, le cinquième et le sixième aussi. Bref, ce qui se résulta en un coloré graphique dont vous avez le loisir d’admirer en début d’article.
Utopique comme éventualité ? Je n’en suis pas si sur. Ce que je sais, c’est que contre toute attente, j’ai représenté l’unifolié en 2010 chez le moins de 23 ans pour les championnats mondiaux. Donc je me permets de caresser ce rêve de gouter à nouveau à cet honneur.
Heureux ceux qui cultivent des rêves. Mais les rêves exigent des sacrifices et peu de rêveurs survivent. Sixième intervalle, mes jambes survivent. Finalement ce n’était pas si mal, j’en aurais bien pris un autre, me gratifiais-je.
Un peu plus tard, je reçus la confirmation : le ski de fond était en effet très beau, ce que me rapportèrent de bienheureux fondeurs.
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