C’est gris, c’est sal, c’est laid. C’est l’hiver mal élevé qui,
tel un parasite, s’accroche aux tout premiers espoirs de sorties cyclistes
printanières.
Je vous entends déjà monter aux barricades. Oui, il y a la
saison de ski qui s’étire, me direz-vous. Joie!, me direz-vous. Non, vous
dirai-je. Certes, il n’y a pas si longtemps, j’aurais savouré chaussé de mes
skis toute cette neige superflue tombée ces derniers jours.
Cette semaine, la seule activité extérieure à laquelle j’ai
pu me livrer, c’est de réaliser à l’aide d’une minuscule pelle conçue pour des
bras de nains un ingénieux système de tranché autour de ma voiture pour l’extirper
du banc de neige, lequel témoignait de l’extrême minutie des déneigeuses de la
ville de Montréal à s’assurer qu’aucun centimètre carré de carrosserie ne
demeure exposé à la lumière du jour.
Conditions impraticables obligent, les routes durent se
passer ces derniers temps de ma présence sur deux roues. C’est tout le
contraire de mes merveilleux outils d’entrainement, qui une fois de plus, ont
su me faire patienter un peu. Mon computrainer,
mon trois-rouleaux et moi sommes
maintenant plus que bons copains. Nous nous détestons. Pas au point de ne plus
jamais nous fréquenter, mais disons simplement que nous sommes mûres pour une
petite pause. Eux savourant un repos bien mérité au sous-sol, moi exprimant mon
art sur la route et bientôt dans les sentiers.
Ce mois de mars est sans pitié pour tout cycliste ayant
passé du bon temps dans le Sud. Mais ce n’est pas la météo qui m’a le plus incité
à pédaler sur place entre quatre murs. Il faut dire que j’ai pris la liberté de
sortir sur les routes laurentiennes la première journée suivant mon retour. Le
contraste est saisissant, voire épeurant.
En tant que cycliste, autant j’étais pour les Cubains un
touriste bien sympathique, autant je suis une proie pour les automobilistes
québécois. Une cible mobile, une nuisance, voire un ennemi public.
À Cuba, si les gens klaxonnent, c’est simplement pour se
faire aimables, pour avertir qu’ils vont doucement vous dépasser. Les gens à
charrette, eux, vous sifflent. En fait, ils sifflotent tout le temps,
particulièrement lorsque les passants sont de sexe féminin.
Au Québec, on ne se donne plus la peine de klaxonner, même
pas pour signaler que vous êtes dans le chemin. On se contente simplement de
prendre bien soin de vous faire comprendre que votre vie n’a aucune valeur aux
yeux des conducteurs. Voilà, je généralise. N’empêche que bien souvent, c’est
la vérité, et c’est bien déplorable.
J’ai parfois l’impression que pour plusieurs conducteurs, ma
vie a autant d’importance qu’un patin à roue à roues alignées aux yeux d’un
poisson rouge.
Bien sûr, il y a des cinglés qui sortent avec leurs vélos de
grand-mère alors qu’il tombe des peaux de lièvre, et ce avec la même grâce et
la même agilité qu’une tortue épileptique. Vous voyez l’image? Rien pour redorer la
réputation du cyclisme hivernal. Je n’affirme pas que tous doivent être sur le
même piédestal sur les routes, comme sur la photo ci-dessus de cette fête
ridicule où le thème est « tous égaux,
tous de la même grandeur ». N’empêche, un peu de civisme sur les routes ferait
grand bien.
Bref, simplement pour vous rappeler que les routes peuvent
réserver quelques surprises printanières, allant de la simple crevaison jusqu’aux
accidents des plus déplorables. Soyez prudent s’il vous plait, conducteurs
comme cyclistes.
Prochaine étape pour moi : Je pars la fin de semaine
prochaine pour Cap Code, pour un quatre jours de vélo de montagne, en agréable
compagnie des gens club C3/Vélo Pays-d’en-Haut. Les sentiers y sont bien
sympathiques, et particulièrement secs pour les premiers jours printaniers. Concernant
ledit club, je coacherai cette année quelques jeunes qui voudront bien
apprendre un peu de ma médecine.
Pour l’heure, en attendant que toute cette neige ait l’amabilité
de disparaître, je passerai encore quelques heures sur mes rouleaux. Sinon,
question de ressortir les bons vieux réflexes, il y a toujours les bons vieux
sentiers de raquette qui se prêtent parfois à quelques ballades pour pneus à
crampons, lorsque les conditions le permettent.
Remarquez, j’y suis allé la fin de semaine dernière, et je n’étais
pas le seul à retrouver mes réflexes. Chuck (sur la photo) n’avait pas oublié que
tous les arbres de la forêt lui appartenaient. Aussi, en maître des lieux, il a
bien pris soin de faire pipi sur le plus grand nombre possible, c'est-à-dire de
quoi remplir une piscine olympique.